Été 2025 : pourquoi les Français ont boudé les restaurants cet été

Alors que la saison estivale touche à sa fin, de nombreux professionnels de la restauration dressent un constat amer : les Français ont délaissé les restaurants pendant l’été. Selon l’UMIH (Union des Métiers de l’Industrie Hôtelière), la fréquentation des établissements aurait chuté de 15 à 20 % par rapport à l’été précédent. Dans certaines zones touristiques, la baisse du chiffre d’affaires atteint même -25 à -35 % pour les restaurants et bars. Comment expliquer ce désamour estival pour la table ? Voici les principaux facteurs qui ont pesé sur la saison, et comment les restaurateurs tentent d’y faire face.

baisse de fréquentation des restaurants : un restaurant presque vide

Un été morose pour la restauration française

Les mois de juillet-août 2025 ont été plus calmes que d’habitude dans de nombreux restaurants. Terrasses clairsemées, tables inoccupées : le phénomène est national. D’après le syndicat UMIH, près de 40 % des professionnels ont constaté une baisse de fréquentation, parfois drastique. « On voit les clients passer, mais ils ne rentrent pas consommer », résume Laurent Barthélémy de l’UMIH Saisonniers. Même sur le littoral méditerranéen habituellement prisé des vacanciers, certains restaurateurs autour de Marseille déplorent -25 à -35 % de chiffre d’affaires par rapport à l’an dernier.

Pourtant, la météo n’a pas été catastrophique. Aucune corrélation n’a été établie entre la chaleur ou la pluie et le manque d’enthousiasme des vacanciers. Les causes de cette désaffection sont à chercher du côté de l’économie et du budget des ménages. En effet, inflation et pouvoir d’achat en berne ont profondément modifié le comportement des consommateurs cet été, au point de faire du restaurant un plaisir souvent sacrifié.

L’effet de l’inflation : des additions plus salées

Est-il devenu trop cher d’aller au restaurant ? À entendre les clients et les restaurateurs, la réponse tend vers le oui. Un touriste de passage sur la Grand’Place de Lille confie ainsi regarder à deux fois les menus avant de s’asseoir : « On voit vite des salades à 20 ou 25 euros, ce n’est pas possible ». En effet, la hausse générale des prix se répercute directement sur l’addition. Du côté des professionnels, on rappelle que les coûts de production explosent depuis deux ans : « Matières premières, énergie, coût du travail… tout a augmenté*. Nous sommes obligés de répercuter ces tarifs sur nos cartes** »*, explique Franck Chaumès, président de l’UMIH Restauration. Les restaurateurs ne peuvent pas vendre à perte, et n’ont souvent d’autre choix que d’augmenter leurs prix.

Le problème, c’est que les revenus des clients, eux, n’ont pas suivi. Face à une inflation encore sensible en 2025, beaucoup de Français ont le sentiment que le restaurant est devenu un luxe qu’ils ne peuvent pas s’offrir aussi souvent qu’avant. Un dîner familial peut aisément dépasser les 100 €, ce qui fait hésiter de nombreux ménages modestes. Conséquence : le ticket moyen par client a nettement baissé, de l’ordre de -20 à -30 % dans beaucoup d’établissements, estime l’UMIH. Même lorsque les clients vont au restaurant, ils dépensent moins qu’auparavant. Un signe clair que le frein financier est bien réel.

Pouvoir d’achat en baisse : les Français arbitrent leurs dépenses

Au-delà des prix affichés, c’est bien le budget vacances des Français qui a dicté leurs choix cet été. Avec l’augmentation du coût de la vie, les ménages ont dû faire des arbitrages. « Les gens arrivent avec un budget global englobant transport, logement, loisirs et restauration. Quand ce budget diminue ou qu’il y a des incertitudes, la première dépense sacrifiée, ce sont les repas au restaurant* »* confirme Laurent Barthélémy. En clair, beaucoup de vacanciers ont réduit la voilure sur les sorties restaurant pour pouvoir assumer le reste des dépenses estivales.

Cette prudence se traduit par de nouvelles habitudes de consommation en vacances. Plutôt que d’aller au restaurant midi et soir, on opte plus souvent pour des solutions économiques : un sandwich ou un plat sur le pouce, de la restauration rapide, ou des courses en supermarché afin de cuisiner soi-même sur son lieu de séjour. Les campings et locations avec cuisine ont ainsi eu la cote, permettant aux familles de se préparer des repas à moindre frais. « On arbitre ses dépenses, on se nourrit différemment. Et si on n’a pas les moyens, on va en restauration rapide ou en grande surface* »*, résume Franck Chaumès. Autre indicateur, un récent baromètre indiquait que 94 % des salariés français comptaient réduire leurs dépenses au restaurant cette année : signe d’une tendance de fond.

Par ailleurs, les clients se montrent plus attentifs au rapport qualité-prix. Payer cher pourrait passer si l’expérience suit, mais certains consommateurs estiment que la qualité a baissé dans certaines adresses pour des prix devenus élevés. Produits surgelés à la place du frais, service expéditif dû au manque de personnel… ces écueils ternissent l’image de la restauration traditionnelle. « Le rapport qualité-prix devient de plus en plus discutable, surtout pour les restaurants les plus basiques », témoigne un vacancier. Dans ce contexte, beaucoup préfèrent réserver leur budget restaurant à des occasions ponctuelles où ils sont sûrs d’en avoir pour leur argent, et boudent les établissements jugés trop ordinaires ou trop chers. Aller au restaurant, autrefois un plaisir quasi-quotidien pour certains, est redevenu un événement plus rare en 2025.

Entre inquiétude et adaptation : la riposte des restaurateurs

Ce reflux de la clientèle inquiète toute la profession. Les organisations patronales ont multiplié les alertes durant l’été. Dans une tribune cosignée fin juillet par une soixantaine de grands chefs, le secteur de la gastronomie a été décrit comme « attaqué de toutes parts » et en danger de perdre ce qui fait son excellence. Franck Chaumès, de l’UMIH, rappelle de son côté qu’en moyenne 25 restaurants ferment chaque jour en France actuellement. Un chiffre alarmant qui reflète les difficultés accumulées depuis la crise du Covid et la flambée des coûts. Les professionnels appellent donc les pouvoirs publics à agir pour redonner du pouvoir d’achat aux Français et alléger certaines charges pesant sur la filière.

En attendant d’hypothétiques mesures structurelles, de nombreux restaurateurs tentent d’adapter leur offre pour faire revenir la clientèle. Face à cette « désertion » progressive, certains n’ont pas eu d’autre choix que de réinventer leurs formules et leurs prix. C’est ainsi qu’on a vu naître, dans plusieurs régions, des menus « anti-crise » à prix coûtant : des formules entrée-plat-dessert aux alentours de 9 €, proposées un jour fixe par semaine. Le pari est risqué mais souvent payant. Par exemple, un restaurateur en Gironde (Nouvelle-Aquitaine) témoigne du succès de son menu à petit prix chaque mardi : la salle fait le plein ce jour-là, au point qu’il envisage d’étendre l’initiative à un second jour de la semaine. « Mieux vaut rogner sur ses marges que voir la salle vide », explique-t-il, un mantra partagé par d’autres confrères en province qui ont suivi le mouvement.

D’autres préfèrent jouer la carte de la simplicité et de la convivialité au quotidien. À Paris, par exemple, certaines brasseries de quartier misent depuis longtemps sur un accueil chaleureux et des prix contenus. Au pied de la Tour Eiffel, l’une d’elles affiche des tarifs imbattables : entrées à 6 € maximum, plat le plus cher à 16 €. Elle fait salle comble midi et soir. Preuve qu’un restaurant peut encore prospérer en temps de crise, à condition de s’adapter aux contraintes de sa clientèle. Ces initiatives montrent qu’il est possible de redonner envie aux Français de revenir à table, en offrant une expérience abordable et humaine. Ce n’est pas seulement un levier commercial : c’est aussi un engagement social pour maintenir l’accessibilité de la restauration et le lien de proximité avec les habitants, quel que soit leur budget.

Grâce à cette créativité et à cette résilience, la restauration de proximité a encore de beaux jours devant elle. Malgré les vents contraires, beaucoup de professionnels se réinventent et continuent de faire vivre ce patrimoine vivant qu’est la table française.

Et vous, restaurateurs et acteurs du secteur, avez-vous constaté cette baisse de fréquentation dans vos établissements cet été ? Quelles solutions avez-vous mises en place ou envisagées pour y faire face ? N’hésitez pas à partager votre expérience dans les commentaires : vos témoignages et idées pourront inspirer toute la communauté des hôteliers-restaurateurs !

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